Quelle est la NATURE des fils, quelle est leur STRUCTURE, et comment les IMPLANTER?
On verra dans ce chapitre que la notion de fil, si simple à imaginer, recouvre en fait des concepts variés et parfois assez complexes. Nous tenterons de les exposer le plus clairement possible, en nous aidant de quelques schémas.
Commençons par leur nature (quel matériau) et leur structure (quelle forme).
Puis viendront les différentes implantations.

NATURE des fils: permanents ou résorbables ?

  • Les fils permanents

    Les fils permanents sont choisis pour leur neutralité biochimique, qui autorise leur présence définitive dans les tissus, laquelle ne se conçoit et ne se justifie que si l’on a une vision à long terme de leur efficacité.
    Ils sont faits de polypropylène pour la plupart, sauf les plus récents qui sont de nature plus complexe. Ce matériau très connu est utilisé depuis plus d’un demi siècle pour les sutures profondes permanentes (sutures cardiaques)
  • Les fils permanents peuvent rester définitivement dans les tissus sans les perturber, en raison de leur parfaite biocompatibilité. Leur neutralité biochimique en fait des implants très sûrs, dont la persistance autorise une vision à long terme de la technique et de ses effets. 
    Si rien dans leur structure (extrémité pointue) ou dans leur situation (position trop superficielle) n’agresse les tissus environnants ni ne sollicite leur mobilisation (mouvements faciaux), ces fils sont d’une parfaite stabilité et s’intègrent à la perfection. En outre, si pour une raison quelconque cela devait se faire, ils pourraient être enlevés.
    Il existe dans le public une défiance à l’encontre des « corps étrangers », qui résiste mal à l’évidence du fait que les matériaux biocompatibles se multiplient, envahissant notre champ thérapeutique, et ce pour une meilleure qualité de vie du genre humain. On est toujours surpris du nombre de solutions externes parfaitement adaptées qui permettent de réparer nos tissus et nos fonctions. Pourquoi pas notre image ?

     

     

    TABLEAU (chronologie des commercialisations) des natures des fils permanents :

     

      Matériau

      Structure

      Ø

      Longueur

      Crans/ cm

    APTOS

    polypropylène

      monofilament

      0,3 mm

     12&25 cm

    3 cr/cm 

    SILHOUETTE SUTURE

    polypropylène

    + ac. Glycolique + ac. polylactique

      monofilament

    + cônes

      0,2 mm

      0,9 mm

      cm

      0,5 cr/cm

    UPACTIV

      polypropylène

      microfilaments

      0,3mm

        30 cm

      /cm

    SPRING THREAD FACE

    polyester    

    gaine silicone

      monofilament

      0,5mm 

      30 cm

      16 cr/cm

    SPRING THREAD CORPS

             
  • Les fils résorbables 

    Les fils résorbables sont faits d’un mélange d’acide glycolique et d’acide polylactique, se résorbant en moins d’un an, ce qui en fait des implants d’un intérêt très différent.
    Leur durée de vie est plus limitée, mais ils peuvent en revanche être renouvelés sans limite.
    Plus courts, d’une nature faussement neutre et d’un crantage presque théorique, ils doivent leur succès au fait qu’ils rassurent ceux qui ne supportent pas l’idée d’abriter un fil permanent. Compte tenu de leur conformation à faible crantage, ils ne peuvent pas avoir d’effet de suspension, mais de par leur nature biochimique, ils peuvent être crédités d’une action revitalisante, ce qui est bien différent et pas suffisant pour le but que nous recherchons.
  • Les fils résorbables (HAPPYLIFT® et leur version sertie ANCHORAGE®) sont beaucoup plus récents et s’inscrivent dans une Politique du Résorbable qui a cours dans le domaine des implants injectables volumateurs, très utilisés en esthétique.

    Leur utilisation soulève plusieurs points importants :

    D’une part ils n’ont pas la neutralité biochimique qu’on veut bien, à tort, leur accorder, probablement en raison de leur durée de vie limitée. De fait, ils sont résorbés par l’organisme, mais au cours d’un processus actif d’évacuation générant une inflammation fibrosante, témoin d’une agressivité biologique certaine pouvant nuire à la peau s’ils sont positionnés trop superficiellement.

    D’autre part, en raison même de leur nature temporaire, ils n’autorisent qu’une vision à très court ou court terme de cette technique. Ils ne pourront donc jamais approcher vraiment les techniques chirurgicales, mais tout au plus les précéder.

    Fils résorbalbes

     

STRUCTURE des fils  : lisses ou crantés ?

  • On peut suspendre les tissus par deux types de fils, les fils lisses et les fils crantés.
    Les premiers sont anciens, d’implantation invariable et d’effet imprécis, alors que les seconds sont récents,  d’implantation très variable et d’effet précis.

  • Bref historique des fils crantés en esthétique.

    L’utilisation la plus ancienne des fils pour embellir le visage se retrouve dès l’Antiquité Egyptienne, ou l’on plaçait déjà des filaments d’or sous la peau afin de la tonifier. Le mécanisme de cette action n’est toujours pas connu, mais les versions plus modernes d’implantation de fils d’or associent un fil de suture résorbable au fil métallique afin de provoquer une courte inflammation pouvant expliquer un petit résultat.
    Malgré ce faible résultat, les fils d’or connaissent une vogue récurrente dans de nombreux pays notamment asiatiques.
    Les fils chirurgicaux modernes sont lisses et permettent d’avoir une action tissulaire, à condition de cercler les tissus pour les porter. Ce sont les premiers fils de suspension.
    C’est le principe résolument innovant du crantage, permettant au fil de n’être plus lisse et glissant mais muni d’aspérités et capable d’accroche, qui a été présenté en 1956 par le Dr J.H.Alcamo, chirurgien américain, qui déposa un dossier de brevet pour lequel il reçut l’agrément en 1964. Il suggérait déjà d’implanter ces fils de manière sinueuse, afin d’améliorer l’accroche dans les tissus. Ce nouveau système de suture devait pouvoir s’effectuer à l’aide d’une machine à coudre qu’il avait aussi conçue mais qui n’a jamais vu le jour. Ces fils, qui n’étaient crantés que dans un seul sens (crans unidirectionnels) n’ont vraisemblablement jamais été fabriqués.

    Le Dr H.J.Buncke, chirurgien américain reconnu comme un des pères de la microchirurgie moderne, est le détenteur d’un brevet déposé en 1997 et approuvé en 1999 concernant des sutures à barbules uni mais aussi bidirectionnelles. Bien qu’inspiré depuis longtemps par les micro-systèmes de harponnage présents dans la nature, -piquant d’oursin ou têtes de graminées-, il ne déposa un brevet que 40 ans après Alcamo, devançant de peu un chirurgien russe qui commercialisa massivement les premiers fils crantés.

    Le chirurgien moscovite M.A.Sulamanidze expérimenta d’abord des fils crantés unidirectionnels, puis des fils bidirectionnels qu’il nomma APTOS®, dont il proposa un protocole d’implantation et assura fort bien la promotion en Europe puis dans le Monde.
    Ses fils courts, souvent sujets à migration, extrusion et inflammation tissulaire parfois tardive en raison de leur raideur et de leur crantage dur et très pointu, manquaient surtout d’effet dans la durée. Il a donc présenté en 2007 un autre type de fil, l’APTOS Spring®, qui n’est plus cranté mais lisse et spiralé et dont la mémoire de forme est censée pourvoir au maintien de l’effet liftant malgré les mouvements faciaux. Ces fils, montés sur un trocart d’insertion spécial de diamètre non négligeable, sont maintenant disponibles en France.
    La société Promoitalia, chargée de la fabrication et de la distribution des fils APTOS dans certains pays d’Europe, a proposé en 2007 des fils crantés résorbables, les fils HAPPYLIFT®, nommés ANCHORAGE® en version sertie. Leur crantage est du type APTOS mais la longueur des crans est très modeste, leur confèrant une accroche pour le moins capricieuse.
    Leur action doit plus à la biostimulation qu’à la suspension.

    Le chirurgien Brésilien J.A.E.Beramendi, s’inspirant comme tant d’autres (Dr Wu de Singapour, etc …) de ces fils russes, a produit des fils semi-rigides à crantage d’une taille impressionnante, nécessitant en outre un trocart d’implantation encore plus imposant. Ils ne sont pas proposés en France, mais il ne parait pas possible de les implanter dans la peau fine des Européens du Nord. La notion de non-invasivité trouve sa limite avec ce type de fils.

    Le chirurgien américain G.L.Ruff, a déposé en 2001 plusieurs brevets de dispositifs crantés avec leur système d’implantation, et fondé la société QUILL, qui après avoir acquis les brevets de Buncke et s’être associée avec Surgical Specialities Corporation, a commercialisé en 2004 les CONTOURS THREADS®, surtout à l’intention des chirurgiens. Ces fils à crans unidirectionnels ont été produits en 2006 dans une version bidirectionnelle, l’ARTICULUS 400®. Malgré l’implantation sinueuse -préconisée par Alcamo il y a plus de 50 ans – qui permettait un gain d’accroche multiplié par quatre, ces fils ont déçu leurs utilisateurs en raison de plusieurs imperfections, notamment un crantage très long et trop fragile.

    Les médecins français se sont aussi intéressés à cette quête d’un fil de suspension parfait.
    Le Dr J.Frismand, chercheur en la société Cousin-Biotech, conçut en 2006 sous l’impulsion du chirurgien E. Semeria à qui la raideur et l’agressivité des fils russes n’avaient pas échappé, un fil en monofilament tricoté de polypropylène permettant une grande souplesse avec de multiples points d’attache tissulaire. Ce fil UPACTIV® bidirectionnel souple et très peu agressif est d’une texture très agréable parfaitement adaptée aux tissus de la face, mais il souffre d’une certaine fragilité et à terme, d’une importante tendance à l’allongement.
    Le Dr J.Frismand, devenu indépendant à la tête de la société First Surgiconcept, a ensuite créé en 2008 un autre fil, le SPRING THREAD®, de structure complètement nouvelle intégrant deux matériaux biocompatibles ; le polyester sous la forme d’une âme hélicoïdale et la silicone sous la forme d’une gaine présentant des protubérances atraumatiques, aspérités nécessaires et suffisantes pour permettre l’attache des fils aux tissus. Ce fil bidirectionnel est très solide, souple, élastique, et très efficace sans être agressif. Il se décline en deux versions, la plus petite pour le visage, et la plus grosse pour le corps.

    Le chirurgien américain N.G.Isse, un des pionniers du lifting endoscopique, s’est intéressé aux fils à une époque ou beaucoup d’expériences étaient déjà faites, et il s’en inspira avant de se lancer dans la conception de son propre produit. Le fil qu’il a développé et commercialisé est très original.
    Il s’agit d’un système à crans unidirectionnels résorbables nécessitant une fixation dans l’aponévrose temporale.
    Le SILHOUETTE SUTURE®, devenu SILHOUETTE LIFT, est composé d’un fil lisse de polypropylène de faible diamètre – 2/10 de mm - noué tous les cm. Entre deux nœuds se trouve bloqué un petit cône d’un matériau résorbable en 8 mois, qui permet une accroche solide à l’implantation, et qui va provoquer lors de sa dégradation une réaction inflammatoire permettant -en principe- de faire tenir ensuite le seul fil à nœuds dans les tissus.
    L’objectif du Dr Isse est d’obtenir une tenue de 2 ans, comparable à celle des injectables volumateurs résorbables. Compte tenu du caractère résorbable du crantage, il paraît difficile d’en demander plus.
    Il paraîtrait pourtant justifié d’en demander plus, compte tenu des conditions d’implantation qui ne sont pas légères, ces fils étant majoritairement posés sous anesthésie générale brève, donc en milieu chirurgical.
    On peut aussi s’interroger sur la pertinence d’une mixité de nature de ce fil, puisque la partie non résorbable persistera mais sans effet, et que la partie efficace va se résorber.
     
    La qualité d’un fil est sans doute un élément fondamental pour obtenir un bon résultat, mais d’autres éléments entrent en compte pour obtenir un résultat esthétique. Ces éléments concernent le protocole d’implantation. 
  • Les fils lisses

    Les fils lisses ne peuvent mobiliser les tissus qu’après les avoir encerclés, partiellement ou complètement. Ils forment alors des boucles, qui sont amarrées plus haut par un seul point sur des tissus solides (aponévroses), ou forment des brides lorsqu’ils sont attachés en deux points.   
    Utilisés depuis fort longtemps en chirurgie, on trouve encore ces fils lisses permanents en esthétique dans des localisations variées, notamment sur l’étage moyen du visage lors des liftings profonds.

  • fil tenseur lisse non-cranté Les boucles et les brides ont l’avantage d’être faciles à mettre en place, mais elles ont aussi de nombreux désavantages qui mènent à leur abandon progressif au fur et à mesure que s’améliorent les fils crantés, beaucoup plus logiques, adaptables et prévisibles dans leurs résultats.
    Malgré les grands services qu’elles rendent dans de nombreux domaines, on retiendra contre elles en Esthétique trois défauts principaux dont le premier est la grande difficulté à les placer symétriquement, le second leur mauvaise adaptation à des zones qui ne sont pas hémisphériques – seule la pommette s’approche de cette forme  alors que tout le visage doit être relevé –, et le troisième leur tendance à sectionner les tissus qu’elles soutiennent par un effet « fil à couper le beurre », provoquant des douleurs et des fossettes qui peuvent obliger à les enlever à plus ou moins long terme.
    Connues depuis les années 60, elles ont fait l’objet de certaines améliorations concernant surtout l’aiguille d’implantation, dont la forme est particulière. Une version récente d’aiguille permet encore de faciliter cette implantation, mais cela ne change rien à la décroissance de l’intérêt de cette technique. 

     

     

  • Les fils crantés

    Lifting par fils crantés Les fils crantés n’englobent pas mais tirent linéairement les tissus grâce aux nombreuses petites aspérités qui recouvrent leur surface. Ce seul petit détail de structure a révolutionné leur utilisation.
    On en distingue deux types ;
    - les fils à crans mono directionnels
    - les fils à crans bi directionnels   

    La grande question concerne donc la structure de ces crans qui doivent être efficaces sans être agressifs.        
    Les fils de suspension à crans bidirectionnels sont récents (BUNCKE 1997 - SULAMANIDZE 1999) alors que les boucles lisses (GUILLEMAIN) et les fils à crans monodirectionnels (ALCAMO 1956) ont été décrits dés avant les années 60. Tous les fils crantés étaient à l’origine destinés à la fermeture des plaies.
    Ils ont beaucoup évolué en 10 ans, puisque de courts (5 à 12 cm) et rigides, avec des crans agressifs, ils sont devenus très longs (35 cm), souples et extensibles, avec des crans non agressifs.


    Différence de crantage, fil cranté agressif et non agressif Chaque type a un mode d’attache aux tissus très différent.
    - les fils à crans monodirectionnels, sont obligatoirement fixés par une autre suture pour prétendre à une réelle action réhaussante.
    - les fils à crans bidirectionnels, non fixés autrement que par leurs propres crans, tiennent seuls dans les tissus tout en « comprimant » ceux-ci en leur centre. Selon leur position sur le visage, ils auront ou non une véritable action réhaussante. (voir implantation des fils).

  • Les fils permanents sont majoritairement faits de polypropylène (APTOS®, UPACTIV®, et en partie seulement pour SILHOUETTE SUTURE®), matériau utilisé depuis plus de 50 ans dans les sutures profondes permanentes. Leur structure dans ce matériau peut varier pour les fils de seconde génération, avec quelques conséquences sur la tenue des résultats (UPACTIV® - microfibres tricotées).
    Leur diamètre est en général de 3/10ème de mm, mais peut diminuer à 2/10ème  (SILHOUETTE SUTURE®), ce qui améliore l’élasticité mais augmente beaucoup le risque d’allongement dans la durée, préjudiciable au résultat.
    La troisième génération de fils permanents (SPRING THREAD®) n’est plus en polypropylène, trop rigide pour les fils anciens, ou au contraire trop sujet à la distension pour les plus récents en fibres tricotées, mais est constituée d’un assemblage de deux matériaux biocompatibles, sous la forme d’une âme de polyester gainée par un revêtement de silicone à crans arrondis.

    Les fils résorbables sont faits d’un mélange d’acide polylactique et d’acide glycolique, dont la résorption, à moitié faite à 8 mois sera complète à 12. On suppose que la résorption de la très fine pointe des crans fait disparaître très rapidement l’élément principal responsable de l’accroche sans lequel l’effet de réhaussement ne peut être obtenu.
    Ils sont pourtant proposés par le fabricant pour 12 à 18 mois de durée de résultat. Durée de présence semble être un terme mieux adapté.
    Il est dit de leur action qu’elle se prolonge après ce délai de résorption par la résistance du cordon de fibrose qui a été généré. Ce qui doit être comparé au fait connu qu’une fibrose de ce diamètre n’a aucune résistance, ainsi qu’à celui tout aussi connu qu’une fibrose de ce genre ne survit pas à la disparition de l’élément fibrosant.


    Il faut signaler l’existence d’un fil mixte, résorbable et permanent (SILHOUETTE SUTURE®), constitué d’un fil de polypropylène permanent de faible diamètre (2/10ème de mm), porteur de nœuds bloquant des cônes résorbables faisant office de crans non traumatiques. La persistance du polypropylène après la résorption de ces cônes oblige à le classer à terme dans la catégorie des fils permanents… sans crans, dont il est le seul représentant.

Comparatif des différentes structures de fils (à la même échelle sur 4 cm)

 

Fil SPRING THREAD ® corps
Fil SPRING THREAD ® visage
Fil SILHOUETTE LIFT ® (cônes résorbables)
Fil cranté UPACTIV ®
Fil cranté résorbable HAPPYLIFT ®
Fil cranté APTOS ®
Fil lisse

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